D’après Hoeben S. & Leroy P-M., (2020),
« Je différencie… », Sambreville : Editions atzéo
La question de la motivation est cruciale dans la gestion de classe et dans l’apprentissage. Il s’agit d’une préoccupation que l’on entend lors de chacune de nos interventions pédagogiques.
Comment motiver les élèves ?
– Il y a ceux qui ne veulent jamais rien faire.
– Il y a ceux qui s’arrêtent tout de suite.
– Il y a ceux qui ne terminent jamais.
– Il y a ceux qui sont toujours distraits par autre chose et qui veulent changer d’activité.
La réponse habituelle, exprimée par les collègues en formation et supportée par le contexte ambiant, consiste à renvoyer au plaisir, à un côté ludique… Il faut que les élèves aiment l’activité ou qu’ils s’amusent. Cette réponse consiste à nommer le plaisir comme synonyme de motivation. Ce réflexe ne résout pas la question car le plaisir est personnel et n’est pas le même pour chaque individu. De plus, cette réponse implique inconsciemment une dépendance (voire une addiction) au plaisir, lié au cerveau limbique.
Cette réponse immédiate vient de la méconnaissance du concept de motivation ainsi que de la place prépondérante du « plaisir immédiat » dans notre société. Pour vendre, tout est bon pour exciter nos émotions, pour nous tenter, pour nous faire croire « qu’il n’y a qu’à… ». Pour une question de facilité (encore), la plupart des propositions (jeux, ateliers, …) créent un amalgame entre « motivation = modification de l’aménagement du contexte de la classe et/ou de l’établissement » et « motivation = engagement dans les tâches pour favoriser l’apprentissage ».
Pour sortir de cette logique, nous vous proposons de découvrir ci-après des éléments théoriques pour comprendre ce qui participe à la motivation des élèves. En fait, il faut clairement parler de motivationSSS et jouer en permanence sur différentes touches pour que le plus possible d’élèves mettent leur moteur en route pour APPRENDRE.
Définition (CFIP)
« La motivation est une énergie individuelle (interne) qui se déclenche quand un individu rencontre en lui-même ou dans son environnement de travail des raisons de « s’investir » dans des activités qui répondent à ses attentes ou à ses désirs. »
Cette définition implique que l’on ne motive pas un individu MAIS que c’est lui qui décide, consciemment ou inconsciemment des raisons d’activer sa motivation.
Divers auteurs (Tardif J., Viau R., Vroom H., …) proposent différentes composantes internes de la motivation et les présentent sous le terme de perception. Ce qui corrobore la dimension personnelle de la motivation. De plus, aucun ne propose le plaisir ou la dimension ludique comme synonyme mais l’évoque comme composante possible !
Un élève est motivé s’il parvient à
- se construire une perception d’une valeur (la valence) :
Je suis motivé si je trouve que cela en vaut la peine, si je suis intéressé par l’action, la démarche ou le résultat.
– Est-ce que la proposition de travail en groupe vaut la peine?
– Est-ce que le projet représente quelque chose pour moi?
– Est-ce que j’aurai du plaisir ?
– Est-ce que la relation avec Madame, Monsieur, donne de la valeur à la proposition?
– Est-ce que j’aime bien ce genre de leçon ?
– Est-ce que je pense que j’aurai grandi ou des facilités après… – Est-ce que je perçois un bénéfice ?
-… - se construire une perception d’une capacité :
Je suis motivé si je trouve que je suis capable, que j’ai des « chances » de réussir.
– Est-ce que c’est dans mes cordes?
– Est-ce que cela va me permettre d’exceller, de briller ?
– Est-ce que je serai fier de moi à la fin ?
– Est-ce que je réussirai tout de suite ?
– Est-ce que je suis certain de progresser tout au long de la séquence ?
-… - se construire une perception d’une contrôlabilité :
Je suis motivé si je perçois que le résultat dépend de moi et de mes efforts. Il ne faut pas que des éléments extérieurs annihilent mon énergie.
– Est-ce que le résultat dépend de moi ?
– Est-ce que j’aurai de l’influence sur mon travail et sur le résultat de celui-ci ?
– Est-ce que j’ai des marges de liberté, de choix ?
– Est-ce que je vois clair dans la démarche et que je ne dépends pas trop d’imprévus ?
-… - se construire une perception d’une instrumentalité :
Je suis motivé si je comprends ou sens que ce qui m’est proposé est un bon moyen pour mon travail de classe ou mon futur.
– Est-ce que je connais le but de la leçon et est-ce que j’y adhère ?
– Est-ce que grâce à ce genre d’activité, j’ai vu qu’il y avait des conséquences positives ?
– Est-ce que je sens que cela sert réellement à une tâche (immédiate ou différée) ?
-…
Ces quatre perceptions montrent combien « la » motivation est un concept complexe et qu’il influence fortement la mobilisation et l’attention des élèves dans les situations de classe qui leur sont proposées au fil de la journée.
C’est pourquoi nous insistons sur quatre éléments :
– Le fait qu’on ne motive pas un individu mais que c’est lui qui décide de mobiliser son énergie vers le but proposé.
– Le fait qu’il existe des motivationSSS.
– Le fait que l’enseignant est responsable de la qualité de l’environnement relationnel et méthodologique susceptible de déclencher un maximum de motivations de la part d’un maximum d’élèves. Cela dépend à nouveau de son observation formative.
– Le fait que l’enseignant doit distinguer les propositions qui influencent positivement le contexte classe/école et celles qui permettent d’agir sur les motivations à apprendre.
Si le climat de la classe et l’aménagement des différentes dimensions de sa gestion sont essentiels pour créer un contexte favorable à l’apprentissage, ces aspects ne sont pas suffisants pour « booster » l’apprentissage de chacune et chacun. Il est donc indispensable de se pencher sur les processus internes aux apprenants par rapport à la construction personnelle de notions, de concepts et de procédures.
Notre métier prendrait toute sa valeur si, lorsque les parents posent la question : « Comment s’est passé ta journée ? », les enfants ne répondaient plus : « Je me suis bien amusé. » mais plutôt : « Chouette, aujourd’hui j’ai appris que …, j’ai appris à…. ».